samedi 30 juin 2007

Une histoire à écrire ( 3 )

Fébrilement, ils se regardèrent et dans leurs regards échangés se lisait une envie puérile de se toucher comme pour se convaincre qu’ils ne rêvaient pas. Ces instants sont courts parce que la force des sentiments en diminue la durée. C’est un peu une grosse vague qui déferle sur la grève et repart rapidement. On la voit venir mais on ne se rend pas compte de sa force. Ce que ressent à cet instant, Jean-Pierre, c’est une sourde force qui l’envahit et qui le domine …il ne sait pas vraiment ce qui se passe dans son esprit et qui l’oblige à enfin …penser. Penser, voilà ce qui lui a toujours manqué. Abruti par la routine d’un travail sans vie, sans charme, sans voix, sans regards, sans chaleur, une vie passée à travailler , répétant sans cesse les mêmes gestes, vous interdisant toute réflexion , toute pensée au point d’oublier que les fleurs ont une odeur qui ressemble à celle de l’Amour . Les fleurs , il les voyait sur la robe de Marie et pour la première fois , il eût envie de les sentir ou… de la sentir… il était tout à côté de la plus belle fleur du monde !
Il se leva rapidement et sans un mot, il traversa la rue d’un pas décidé ce qui fit penser à Marie qu’il était parti pour ne plus revenir. Elle se demanda ce qui a bien pu se passer dans la tête de celui qui quelques minutes auparavant lui tenait tendrement la main. Elle le regarda partir sans comprendre. La voix du garçon de café la fit sursauter « Bonjour Madame ce sera quoi ? » Sans hésiter elle répondit « un diabolo menthe ! » Elle chercha du regard Jean-Pierre qui avait disparu comme englouti par le flot de voitures qui roulaient à vive allure. Le garçon réapparut et Marie se fit servir son diabolo qu’elle se mit hâtivement à siroter comme se donner l’illusion d’une sérénité disparue en même temps que Jean-Pierre. « Mais que m’arrive-t-il ? Pourquoi suis-je troublée ? »
C’est vrai, le désarroi se lisait sur son visage, se devinait à son attitude agitée, et surtout au machinal geste qu’elle répétait pour remonter ses cheveux qui cachaient un visage devenu subitement livide. La fleur se fanait au fur et à mesure que le temps passait et que Jean-Pierre ne revenait pas. L’amour ça fait mal quand on le voir partir et qu’il disparaît de notre vue. Elle ouvrit son sac pour en tirer une cigarette qu’elle alluma et tira quelques bouffées et finit par l’écraser dans le cendrier où Jean-Pierre avait laissé la sienne toute allumée et qui se consumait encore. Elle la porta à ses lèvres et semblait chercher à travers le filtre l’odeur de celui qui la quitta sans un mot. L’amour quand il s’en va, n’a pas de mots pour dire qu’il nous quitte. Les silences de l’amour sont pesants, les mots de la souffrance sont muets. Marie était là, assise, muette, tenant la cigarette de Jean-Pierre entre ses doigts qui tremblotaient et un sentiment de douleur submergea tout son être. Une larme descendit sur tout son visage , puis une autre et encore une autre , inondant sa bouche de ce liquide salé que l’on goûte à chaque désespoir…C’est la douleur qui s’exprime …..

A suivre…….

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